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Deux nouvelles voitures et une pour Yazeed Al Rajhi en 2026"

Jean-Marc Fortin, directeur d’Overdrive Racing et directeur sportif de Toyota Gazoo Racing W2RC.

« Deux nouvelles voitures et une pour Yazeed Al Rajhi en 2026. » 

Jean-Marc Fortin, qui vient de fêter ses 57 ans, ne semble pas plus subir le poids des années que celui des responsabilités, qu’il cumule comme jamais cette saison. Pour commencer 2025, l’équipe Overdrive Racing qu’il dirige depuis treize Dakar s’est imposée en Arabie Saoudite, pour la première fois avec Yazeed Al Rajhi. En coulisses, le Belge a pris les commandes du développement des futures Toyota du désert, dont une nouvelle version thermique entrera en piste dès la saison 2026. Auréolé de la casquette supplémentaire de directeur sportif Toyota Gazoo Racing W2RC depuis janvier dernier, Jean-Marc Fortin a ensuite promu Henk Lategan comme nouveau contestataire de Nasser Al Attiyah jusqu’en 2027. Entretien avec « Boule », plus boulimique que jamais de succès, qui finit par faire référence à son compatriote « Le Cannibale ».

Christian Loriaux, ingénieur passé par Prodrive, M Sport et Hyundai, a rejoint Overdrive Racing juste avant la saison 2025. Quelle est sa mission ?

Christian Loriaux est arrivé chez Overdrive Racing à la fin de l’année dernière et s’est impliqué dans le programme Toyota Gazoo Racing W2RC avec pour objectif de construire une nouvelle voiture en Europe avec le soutien budgétaire de Toyota Gazoo Racing Europe et du Japon. Christian est le directeur technique de ce nouveau projet qui a six mois. Une impulsion existait déjà chez Overdrive Racing, on développait certaines choses comme on l’a fait sur le dernier Dakar avec toute la gestion moteur du « torque meter », mais la partie châssis et les pièces techniques provenaient encore d’Afrique du Sud. Dorénavant, ce sera totalement différent. La conception de la nouvelle voiture qui roulera dès 2026 est actuellement réalisée en Belgique avec des moyens européens.

Christian Loriaux a déjà été votre consultant sur le Dakar 2021, pourquoi l’intégrer aussi fortement ?

On avait besoin d’un directeur technique à temps plein car Toyota a des projets qui nous imposent de nous structurer un peu plus afin de pouvoir les réaliser dans un laps de temps assez court. On est par exemple venu présenter aux organisateurs du Dakar un projet de futur Hilux nouvelles technologies inspiré du Hyse apparu sur le Dakar en Mission 1000. Mais avant cela, Christian va devoir réaliser le nouveau châssis. Car dès le Dakar 2026, il y aura une nouvelle voiture thermique avec le même moteur bi-turbo 3,5 litres. La nouvelle technologie sera un programme parallèle, cela ne sera pas une auto faite pour gagner mais pour démontrer, valider certaines choses en milieu hostile. Il y aura une voiture révolutionnaire sur le Dakar 2027, ou peut-être 2028.

Glyn Hall, l’ingénieur derrière l’actuelle Hilux DKR, vient également de vous rejoindre début juillet. Quel est son rôle ?

C’est en effet le retour sur le bivouac de celui qui a été directeur Toyota Gazoo Racing quand Nasser a gagné les Dakar 2022-23 et que j’étais directeur sportif. Glyn Hall nous rejoint comme consultant technique sur tout le projet Toyota Gazoo Racing W2RC. On a gagné sans lui l’an passé, mais c’est bien qu’il soit de retour, car c’est l’homme qui a fait l’histoire de Toyota en rallye-raid au niveau technique. C’est important qu’une force aussi vive nous rejoigne et je suis très heureux de ce qui se passe en ce moment.

La version turbo du Hilux DKR est apparue fin 2023 avant de courir les saisons 2024-25. Deux ans, c’est un cycle très court pour refaire une auto, non ?

Non, car on a une voiture qui a été développée pour le Dakar 2019. Pour le Dakar 2022, elle a été adaptée en T1+, on l’a entre guillemets bodybuildé au niveau des voies, mais son châssis reste celui du T1, étroit. Là, on construit une voiture plus large qui permet de descendre le centre de gravité de certains éléments et qui va recevoir beaucoup d’évolutions comme une nouvelle géométrie, des nouveaux freins... C’est une voiture totalement différente avec un look qui sera lui aussi revu.

Combien de ces nouveaux Hilux seront au départ de la saison 2026 et qui seront les pilotes ?

Au minimum trois. Deux nouvelles voitures officielles et une pour Yazeed Al Rajhi, c’est l’objectif. Plus peut-être une voiture de test avec un troisième pilote Toyota Gazoo Racing. Henk Lategan a rejoint le programme, il ne roulera plus en Afrique du Sud sur le championnat national. Il sera actif en fin de saison 2025, 2026 et 2027 dans une voiture officielle Toyota Gazoo Racing au sein du programme W2RC. On est en bonne voie de continuer l’expérience avec Seth Quintero. On a pris un pari avec lui et on va aller au bout de l’histoire. L’année 2026 sera celle où il devra faire ses preuves. Il a fait un bon rallye en Afrique du Sud où il a manqué de peu le podium, et Dieu sait s’il y avait de la concurrence. On va continuer une année de plus avec Seth et j’en suis très heureux.

« Henk Lategan sera actif en fin de saison 2025, 2026 et 2027 dans une voiture officielle Toyota Gazoo Racing au sein du programme W2RC. »

À quand le retour de Yazeed Al Rajhi ?

On devait essayer de faire la Baja Aragon, mais c’est encore un peu tôt. On va repousser son retour à la rentrée, un peu avant le Portugal pour rouler la fin d’année ensemble, plus évidemment la saison 2026.   Henk Lategan peut-il devenir champion du monde cette saison face à Nasser Al Attiyah ? Après le Dakar, j’aurais dit oui. Il a signé une très belle performance en début d’année en terminant deuxième du Dakar pour son retour de blessure. La victoire s’est jouée à peu de choses. Le laisser à la maison pour une question de procédure et de continuité de contrat avec l’Afrique du Sud l’a beaucoup frustré. Son impasse sur l’Abu Dhabi Desert Challenge a changé la donne. Avec sa victoire en Afrique du Sud, il a démontré qu’il avait toutes ses chances sur le championnat. Maintenant, on a quelques points de retard. Au Portugal, il pourrait faire jeu égal avec Nasser, même si la Dacia est très bonne sur ce type de terrain. Ensuite, Nasser au Maroc, c’est un peu comme s’il était chez lui. Cela va être dur, mais c’est surement en interne que l’on a perdu le titre.

Vainqueur de 3 Dakar avec Al Attiyah, du dernier avec Al Rajhi, de 2 titres pilotes et de 3 constructeurs W2RC, vous êtes comblé ? Depuis 2019, Toyota n’a pas été trop mauvais ! La victoire sur le Dakar 2019 a effacé la frustration que l’on avait accumulée durant plusieurs saisons en raison du règlement qui ne favorisait pas notre 4x4 T1 face aux deux roues motrices qui étaient souvent avantagées. Maintenant, on a les mêmes pneus, les mêmes types de motorisation - à part Ford - mais avec une balance des performances qui est assez bonne. Depuis 2022 et l’apparition du T1+, on a un championnat qui est relevé et qui a un intérêt futur, ce que l’on voit avec de nouveaux constructeurs qui arrivent sur le W2RC. Au niveau résultat, on est encore bien parti pour gagner le titre constructeurs. C’est clair que je suis comblé, ces cinq dernières années on a eu beaucoup de succès, on a gagné beaucoup de courses, on est avec Dacia, Ford, Mini, toujours dans un vrai challenge. Mais je ne suis jamais rassasié. J’ai un modèle : le coureur cycliste belge que l’on surnommait Le Cannibale (Eddy Merckx, NDLR). Je trouve que sa volonté est un exemple pour tous et jamais il ne faut se lasser de gagner. La preuve en est cette année avec les victoires sur le Dakar et en Afrique du Sud. Et j’espère en avoir encore d’autres.